Manuel scolaire : Ngalle Bibehe résistera-t-il aux réseaux maffieux ?

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Les changements itératifs intervenant sur le marché du livre alimentent les supputations les plus folles, notamment celles inhérentes au bien-fondé desdits changements eu égard à une situation sociopolitique morose, mais aussi et surtout par la dégradation du niveau général des apprenants. Aussi n’a-t-on pas hésité d’établir une forte corrélation entre les intérêts économiques sous-jacents à ce marché et l’enrôlement à celui-ci, des ministres en charge des différents départements ministériels en charge de l’éducation et singulièrement celui des enseignements secondaires, Jean Ernest Ngalle Bibehe.

La forte fluctuation observée au niveau du manuel scolaire n’a de cesse de susciter des récriminations aux populations qui, bien qu’ayant intégré la nécessité d’un arrimage des enseignements à notre environnement socioculturel, comprennent mal par ailleurs qu’on ne parvienne guère à quelque stabilité, dans la programmation des manuels scolaires d’une année à l’autre. Un peu comme si, devenus de véritables pantins les inspecteurs pédagogiques ne tiendraient plus qu’un rôle de faire-valoir. C’est le cas effectivement de le penser, tant éditeurs et auteurs se bousculent au portillon pour rafler la mise, parlant du marché du livre scolaire au Cameroun. Du coup, la programmation ne semble plus obéir à quelque impératif de bonification des connaissances livresques des apprenants, mais plutôt aux intérêts économiques attachés aux manuels scolaires. Et ainsi pris, les enjeux réels se transposent sur l’intéressement du chef du département ministériel en charge des enseignements. Et comme en la matière, le ministère des enseignements secondaires constitue le gros dudit marché, il subit conséquemment les batailles les plus rudes de préséance entre éditeurs d’une part et auteurs d’autre part. Batailles auxquelles n’échappent point le ministre lui-même, quand vient pour lui le moment de procéder à l’arbitrage. Et dans cette optique, si jusqu’alors le Minesec Jean Ernest Ngalle Bibehe aura été exempt du choix des manuels scolaires depuis son accession à la tête dudit ministère, il ne fait pour de doute qu’il y sera très rapidement confronté.

Dilemme

Au demeurant, si l’impératif de professionnalisation plus accrue des enseignements induit l’adaptabilité du manuel scolaire à cette option, il est tout de même constant que la situation ainsi engendrée suscite quelque dilemme au chef de ce département ministériel. Aussi celui-ci doit-il concilier l’adéquation des enseignements contenus dans les manuels scolaires au budget psychologique des parents. Une obligation à laquelle n’obéissent malheureusement pas toujours ceux des manuels scolaires inscrits au programme. Aussi peut-on comprendre que le Minesec soit régulièrement mis à l’index, non sans qu’on lui attribue généralement la validation quelque peu à l’aveuglette de certains manuels scolaires. Analyse faite pourtant, on peut valablement lui concéder le fait de n’être pas à proprement parler, «un technicien du livre». Toutefois, sa qualité de manager en chef du département ministériel des enseignements secondaires doit lui imposer de s’adosser sur ceux des collaborateurs les mieux à même d’opérer en toute objectivité le listing des manuels en fonction des différents niveaux d’apprentissage. Ce qui malheureusement ne semble pas être de mise, si l’on s’en tient fort à propos aux réserves de certains enseignants. Des réserves qui viennent ainsi conforter la thèse d’une collusion manifeste au sein du Minesec que ne saurait ignorer le chef de ce département ministériel. Aussi peut-on comprendre que d’aucuns n’hésitent pas de lui en attribuer la responsabilité première en insinuant par ailleurs son aval tacite.

Interrogations

Fort de ce qui précède et connaissant l’intégrité de Jean Ernest Ngalle Bibehe, il y a lieu de se demander s’il prêtera également le flanc aux adeptes des manœuvres rédhibitoires attachées aux choix des manuels scolaires. Car, s’il est communément admis qu’il  pourfend la corruption, il est difficile de maîtriser tous les circuits intervenant autant dans le choix des manuels scolaires. Aussi devra-t-il être davantage regardant en la matière pour se prémunir d’une sorte d’enlisement préjudiciable inhérent aux récriminations récurrentes engendrées par les changements itératifs évoqués supra. Pour ce faire toutefois, s’il sait pouvoir compter sur des hommes de confiance, il devra par ailleurs leur imposer des garde-fous en les amenant à ne point céder aux clairons du chantage alimentaire généralement utilisé par les représentants des éditeurs souvent conviés aux commissions précédant la publication de la liste des manuels scolaires en prélude à la rentrée scolaire. Plus grave, les retards de cette publication sont de nature à corser davantage les suspicions et accusations de collusion de fait des officiels commis pour diligenter le choix des manuels scolaires. Suffisant dès lors pour imposer au Minesec d’inscrire la tenue de la commission dédiée suivant un calendrier qui réfrène toute velléité de collusion ou de ce qui en tiendrait lieu. C’est à ce prix et à celui-là uniquement que le marché du manuel scolaire survivra les récriminations à son encontre en se sonnant pour objectif d’améliorer effectivement le niveau d’apprentissage des apprenants.

                                                                    Babine NSOA