La récente tempête, qui a secoué les marchés financiers, a révélé aussi les failles des agences de notations qui ne brillent pas par la transparence.
Aux premières heures de la crise, les gouvernements, aux Etats-unis comme ailleurs, se sont empressés d’éteindre l’incendie pour sauver ce qui pouvait être sauvé alors que les places boursières étaient prises de panique. En réfléchissant sur ce qu’il y a lieu de faire à l’avenir, les investisseurs se demandent aujourd’hui comment ce qui est arrivé a-t-il pu arriver? Comment les édifices apparemment solides ont-ils pu s’effondrer tout d’un coup comme des châteaux de carte ? Plus concrètement, comment n’a-t-on pas vu venir la faillite de Léman Brothers et les fortes menaces qui pesaient sur ses consoeurs américaines et européennes ? Ces questions renvoient inéluctablement au fonctionnement des agences de notation et à leurs responsabilités dans la crise financière.
Ces agences ont pour vocation d’évaluer la solvabilité des entreprises et des banques, qui veulent emprunter, de les inviter à appliquer les normes prudentielle et d’éviter d’éventuels dérapages. Or, la faillite trop brutale de certaines institutions bancaires, pourtant bien notées auparavant, a laissé supposer que les agences de notations ont été assez complaisantes à l’égard des structures qu’elles sont appelées à noter. Cela dit, l’information que le public pouvait disposer sur l’état de solvabilité des banques ne correspondait pas à la réalité de ce qu’elles valaient.
Les malheurs de Dexia, de Fortis ou de Hypo Real Estate qui ont provoqué une intervention urgente des gouvernements allemands, français et néerlandais ont pris ces derniers de court. Quelques heures seulement avant, ceux-ci pariaient sur la capacité des banques européennes à résister parce que, disaient-ils, les banques européennes ne faisaient pas les mêmes types d’opérations que les banques américaines, qu’elles n’ont pas les mêmes structures ou ne fonctionnent pas de la même manière.
Le problème, c’est que les gouvernements concernés ne savaient pas la situation réelle des banques. Ils ne savaient ni la valeur de leurs fonds propres ni leur solvabilité ni l’ampleur des dégâts qu’elles pouvaient avoir commis à travers les actifs pourris. Les agences de notation ont été coupables de complaisance.
Le drame est cependant que le système n’a pas prévu de mécanisme de contrôle auquel elles doivent être soumises à leur tour. Plus grave, le fait que ses agences soient rémunérées par les entreprises qu’elles notent dénotent une gaucherie du système. Aux Etats-Unis, les dégâts causés par les sub-primes n’auraient pas eu l’ampleur observée si les agences de notation avaient été plus honnêtes. Des analystes pensent qu’ils ont sous-estimé les risques de produits financiers opaques, puis tardés à tenir compte de la détérioration du marché dans leurs analyses.
Au moment où l’on multiplie les sommets à travers la planète pour repenser le capitalisme, quelque chose doit être fait pour que les agences de notations servent véritablement de baromètre aux acteurs du marché. La Commission européenne a proposé à la veille du sommet du G20 des mesures concrètes pour mieux encadrer l’activité de ces organismes. A travers ses mesures, elle entend promouvoir la transparence et éviter à ces agences des conflits d’intérêts. Pour ce faire, elles devront s’abstenir de jouer le rôle de conseil, afin d’éviter de participer à l’élaboration de produits financiers à risque.
De même, la commission préconise « qu’au sein des Conseils d’administration et de surveillance, deux personnes devront avoir une rétribution qui ne dépende pas des performances de l’agence. Elles devront s’abstenir d’évaluer lorsque leurs informations font défaut, en quantité ou en qualité. Pour assurer la transparence, elles devront faire un rapport annuel, avoir un système de contrôle interne et divulguer les méthodes de travail et d’hypothèses qui servent de base à leurs analyses. On leur demandera aussi de révéler le nom des clients qui apportent plus de 5 % de leur chiffre d’affaires ».
Enfin, la Commission propose un système d’enregistrement, avec possibilité de retirer éventuellement la licence des agences de notation.
Richard kenmogne