Accompagné d’une bonne brochette d’hommes d’affaires, la tournée africaine du Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, l’a conduit du 4 au 7 juillet dernier en Ouganda, au Kenya, au Rwanda et en Ethiopie.
Le voyage du Premier ministre israélien en Ouganda, le 4 juillet 2016, est chargé de symbole. C’est le jour de l’anniversaire d’un événement qui a marqué les esprits aussi bien en Ouganda qu’en Israël. Le 27 juin 1976, le vol 139 d’Air France reliant Tel-Aviv à Paris est détourné en effet vers Kampala par le Front de libération de la Palestine et accueilli par Idi Amin Dada à l’aéroport d’Entebbe. Du 3 au 4 juillet de la même année, un commando israélien lance l’assaut et libère la plupart des otages. Cet événement marquera aussi Benyamin Netanyahu, à titre personnel, car son frère ainé Yonatan Netanyahou, membre du commando va trouver la mort pendant le raid.
C’est à côté de l’avion qui avait permis à la troupe de mener l’opération que Netanyahou fait son discours. En plus du symbole, il y avait de l’émotion. Le Premier ministre n’a pas eu de la peine à faire le lien entre cette prise d’otages, qui eut lieu il y a 40 ans, et ceux commis par les extrémistes palestiniens en Israël, tout autant les actes de l’Etat islamique en Afrique et en Europe aujourd’hui. Il y a donc urgence pour l’Israël et l’Ouganda de se mettre ensemble pour une cause commune: la lutte contre le terrorisme. De même, il a félicité le président Yoweri Museveni pour son engagement contre les Shebab en Somalie.
Kenya, 5 juillet 2016. C’est au tour du président Uhuru Kenyatta d’accueillir le Premier ministre israélien. L’ambiance est des plus conviviales. La relation entre le Kenya et l’Etat hébreux est particulière. Le Kenya, qui abrite une importante communauté d’israéliens, est presque considéré comme l’autre patrie des juifs, d’autant plus que Nairobi abrite l’une des plus grandes synagogues d’Afrique. Au menu des entretiens entre Kenyatta et Netanyahu, outre la lutte contre le terrorisme, les deux hommes ont parlé de partenariat économique. « Ici, nous sommes vus comme une superpuissance dans de nombreux domaines : les technologies, le renseignement, l’eau, l’agriculture, la cybernétique et bien d’autres choses», dit le Premier ministre. L’expertise de l’Etat hébreux peut être donc mise au service du développement du continent. C’est donc à juste titre que Uhuru Kenyatta affirmera que l’Afrique a besoin d’Israël.
Historique
Kigali, 6 juillet 2016. Le président Rwanda et le Premier ministre israélien ont quelque chose en partage. Dans leur histoire commune, on trouve le mot génocide. Le mémorial de Gisozi, où reposent dans des sépultures communes de quelques 250 000 des 800 000 victimes, est le témoignage de la barbarie humaine. Une barbarie dont les Juifs ont été également victimes. Benjamin Netanyahou, qui était avec son hôte à ce mémorial, rappelle au président Paul Kagamé, lors d’une conférence de presse conjointe: « mon peuple connaît également la douleur d’un génocide. C’est un lien unique, même si c’est un lien qu’aucun de nos peuples ne souhaite avoir ».
C’est par l’Ethiopie que le Premier ministre a terminé son voyage en Afrique. Un voyage qualifié d’historique par les commentateurs. En tout cas, c’est la première fois qu’un chef de gouvernement israélien arrive en Afrique depuis 20 ans. Partout où il est passé, Benyamin Netanyahu a présenté son pays comme le symbole de la lutte contre le terrorisme, un phénomène qui touche désormais, et plus sérieusement, l’Afrique. Il l’a présenté comme un partenaire de développement fort intéressant.
En réalité, le déplacement du Premier ministre, qu’accompagnaient des hommes d’affaires, recouvrait bien des enjeux économiques. Etant donné que le continent a d’énormes potentialités. Au moment où il est devenu le théâtre des rivalités entre anciennes et nouvelles puissances, Israël ne doit pas continuer à rester en marge.
Au-delà des symboles et des enjeux économiques, l’arrivée de Netanyahu en Afrique répond aussi à un choix stratégique, à savoir rompre avec l’isolement diplomatique actuel de son pays et réchauffer des liens (souvent minés par le conflit israélo-arabe) utiles en vue d’un partenariat stratégique, dans un contexte où l’Iran se repositionne sur l’échiquier international.
Yannick Steve Tatchim