François Fillon a-t-il sollicité l’exécutif pour accélérer les procédures judiciaires visant Nicolas Sarkozy? Les révélations de deux journalistes du Monde mettent dans l’embarras l’ex-Premier ministre et surtout Jean-Pierre Jouyet, le secrétaire général de l’Élysée.
«Je ne peux pas ne pas voir dans ces attaques invraisemblables une forme de déstabilisation et de complot», dénonce François Fillon dans le Journal du dimanche. Il dément une nouvelle fois être intervenu auprès de Jean-Pierre Jouyet et porte plainte en diffamation contre le Monde et ses deux journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme, auteurs du livre Sarko s’est tuer (Stock), qui a mis le feu aux poudres.
«Nous n’avons absolument rien inventé»
«J’ai toujours respecté mes adversaires politiques et, a fortiori, les membres de ma propre famille politique. Je n’éprouve que du dégoût devant de tels procédés qui discréditent notre démocratie», fustige François Fillon, qui dit «Stop aux boules puantes!». «Inimaginable», avait quant à lui rétorqué Jean-Pierre Jouyet. Mais les deux journalistes maintiennent leur version avec à l’appui une interview du numéro 2 de l’Élysée le 20 septembre au palais présidentiel, enregistrée avec l’assentiment de l’intéressé, et publiée en partie dans le Monde paru samedi.
D’après eux, Jean-Pierre Jouyet avait bien donné son accord pour que son récit soit restitué dans leur livre à la condition que ses propos ne soient pas cités entre guillemets, ce qu’ils ont respecté. «En démentant en bloc, il porte atteinte à notre crédibilité professionnelle», a expliqué à l’AFP Gérard Davet. «C’est donc pour cela que nous avons choisi dans Le Monde de décrypter ses propos pour que les gens comprennent bien que nous n’avons absolument rien inventé».
Un proche de François Fillon, le député UMP Jérôme Chartier, a demandé aux journalistes de «faire entendre» leur enregistrement. Dans l’entourage de Nicolas Sarkozy, seul le porte-parole, Gérald Darmanin, a pour l’instant réagi en glissant dans le JDD que si l’ancien Premier ministre est bel et bien intervenu auprès de Jean-Pierre Jouyet, «ce serait d’une gravité exceptionnelle».
Jean-Pierre Jouyet, «un personnage intrigant»
Cette affaire peut-elle éclabousser le chef de l’État? L’Elysée est resté silencieux. Mais un proche du président souligne que François Hollande s’est toujours tenu scrupuleusement au respect de l’indépendance de la justice et «n’est jamais sorti de cette ligne», «il est inattaquable, inflexible», a-t-il assuré à l’AFP.
Dans l’article du Monde, le chef de l’Etat n’est d’ailleurs pas mis en cause. Selon les propos rapportés de Jean-Pierre Jouyet, il a opposé un non catégorique à toute intervention. «Quand Fillon m’a dit ça, j’ai dit: « Tiens, oui, on pourrait simplement signaler le machin… » Mais François (Hollande) m’a dit: « Non, non, on ne s’en occupe pas »», relate le quotidien. En tout cas, conclut un proche du chef de l’Etat, «c’est du pain bénit pour Nicolas Sarkozy».
«C’est très grave», estime pour sa part un membre de l’exécutif assurant que nombre de ministres voient en Jean-Pierre Jouyet «un personnage intrigant» qui «manipule tout le monde». Ils reprochent à cet ami intime de François Hollande, qui l’a propulsé le 16 avril secrétaire général de l’Élysée, un poste charnière, d’entretenir des relations «troubles» avec la droite
AFP