Etat de la presse dans le monde en 2024: Nombre record de journalistes tués

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Plus de journalistes tués au cours de l’année 2024 en comparaison à l’année 2023. C’est en tout cas ce qui ressort du Rapport annuel de la Presse Emblème Campagne (PEC), publié le 17 décembre 2024. L’organisation qui est basée à Genève en Suisse a arrêté les décomptes au 15 décembre et 21 pays sont concernés par cette situation dramatique. Elle souligne que cette année, il y a eu une hausse de plus de 18% des chasseurs de l’information tués par rapport à l’année 2023. « Près des trois quarts des journalistes tués cette année l’ont été dans une zone de conflit (120 sur 165). » ; indique le rapport qui cible notamment les guerres du Proche-Orient et d’Ukraine.

En Afrique, les pays où ont été assassinés les journalistes sont : le Soudan (cinq journalistes tués) ; on dénombre également deux tués en Somalie, ainsi qu’en République démocratique du Congo (RDC) et un au Tchad

Serge HENGOUP 

 

L’intégralité du Rapport de la PEC

Un nombre record de travailleurs des médias ont été tués cette année, a déploré mardi à Genève la Presse Emblème Campagne (PEC). Au moins 165 d’entre eux ont perdu la vie dans 21 pays dans le monde (jusqu’au 15 décembre). Deux conflits sont responsables des deux tiers des victimes : les guerres du Proche-Orient et d’Ukraine.

La hausse par rapport à 2023 est de près de 18 %

« La situation est particulièrement dramatique dans la bande de Gaza en raison de la poursuite des frappes israéliennes », a déclaré le président de la PEC Blaise Lempen. « L’élimination des journalistes palestiniens sur le terrain, de manière ciblée ou accidentelle, la destruction des installations des médias, le refus de laisser les journalistes étrangers entrer dans la bande de Gaza, les pressions sur les médias israéliens démontrent une volonté systématique du gouvernement israélien actuel d’empêcher toute information sur le sort de la population palestinienne », a-t-il ajouté.

Depuis le 1er janvier, les conflits au Proche-Orient ont fait 82 victimes parmi les journalistes, soit au moins 74 dans la bande de Gaza, 6 au Liban et 2 en Syrie. Au total, les hostilités à Gaza ont fait depuis le 7 octobre 2023 au moins 155 tués parmi les travailleurs des médias, un bilan sans précédent dans un conflit en un si court laps de temps.

La guerre en Ukraine a provoqué en 2024 la mort de 19 journalistes ukrainiens (la plupart enrôlés dans l’armée) plus un étranger (Ryan Evans de Reuters à Kramatorsk). Quatre journalistes russes ont été victimes du conflit, trois dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie, une à Kursk. Il faut ajouter le décès en détention en Russie le 10 octobre de la journaliste ukrainienne Victoria Rochtchina, soit au total 25 victimes (voir paragraphe sur les sources ci-dessous).

En dehors du Proche-Orient et de l’Ukraine, le Pakistan a dénombré le plus grand nombre de journalistes tués, 12 depuis janvier, une nette dégradation. La Russie totalise 7 tués (avec les 3 dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie). Au Bangladesh, les troubles survenus en juillet ont fait 7 victimes parmi les journalistes.

La situation reste très dangereuse au Mexique, avec 7 assassinats de journalistes. Les hostilités au Soudan ont provoqué la mort de cinq journalistes. En Colombie, on déplore 4 tués, 4 en Inde, 3 en Irak, et 3 au Myanmar (Birmanie). Deux tués ont été recensés en Somalie et deux en République démocratique du Congo (RDC).

Suivent avec une victime dans chaque pays : Cambodge, Équateur, Honduras, Indonésie, Philippines et Tchad.

Moins en Amérique latine

Le bilan de 165 victimes correspond à 3 victimes par semaine. En dix ans, la PEC a dénombré 1172 victimes, soit 2,25 par semaine en moyenne. Ces cinq dernières années, les pays les plus dangereux ont été Gaza/Cisjordanie (159), l’Ukraine (59), le Mexique (55), le Pakistan (36) et l’Inde (32).

Par continent en 2024, le Proche-Orient compte le plus grand nombre de victimes (85 : Gaza, Liban, Syrie et Irak), devant l’Asie (30) et l’Europe (28 : Ukraine et Russie). L’Amérique latine suit (13 tués) puis l’Afrique (9 tués). Outre au Proche-Orient et en Europe, on note une détérioration en Asie d’une année sur l’autre (30 tués contre 12). Par contre, tendance positive, il y a moins de victimes en Amérique latine cette année par rapport à l’année précédente (13 contre 20).

Près des trois quarts des journalistes tués cette année l’ont été dans une zone de conflit (120 sur 165). A ce stade des enquêtes, il n’est pas possible de déterminer le nombre de meurtres délibérés par rapport aux morts accidentels (victimes de tirs, bombardements). Beaucoup d’autres journalistes ont été blessés, en particulier au Liban.

La PEC condamne ces crimes, commis en violation du droit international et des législations nationales. Des enquêtes indépendantes sont indispensables pour clarifier les circonstances et poursuivre les responsables afin de lutter contre l’impunité.

Sources

Sources : en Ukraine, la PEC se base sur le décompte de l’Institute of Mass Information (https://imi.org.ua/en), en ajoutant les tués du côté russe. Selon l’IMI, le conflit en Ukraine depuis février 2022 a fait 93 victimes. L’Institut compte les journalistes tués dans les rangs des forces armées (dont la mort de certains d’entre eux n’est connue souvent que plusieurs mois plus tard, d’où un report des tués de 2023 sur 2024). La PEC ajoute dans sa statistique les journalistes russes tués, non recensés par l’IMI, et dont la mort en raison des combats a été annoncée par les médias russes.

Pour Gaza, les chiffres du Syndicat des journalistes palestiniens et du bureau des médias du gouvernement du Hamas sont plus élevés (196 depuis octobre 2023). La difficulté est de savoir si certaines victimes répondent aux critères habituels de la profession de journaliste (carte de presse, accréditation par un média) ou s’ils se sont improvisés journalistes en raison des circonstances. Il est impossible de savoir avec certitude s’ils ont été visés délibérément ou non, en l’absence d’enquêtes et de témoins indépendants sur les lieux.

Ailleurs dans le monde, la PEC utilise les nouvelles diffusées par les médias locaux et les agences de presse.

A la différence d’autres organisations, la PEC considère dans sa statistique tous les journalistes tués, que leur décès soit lié ou non à leur activité professionnelle. Il est en effet difficile de prouver qu’un crime est commis en relation avec le travail d’un journaliste sans une enquête indépendante et complète qui fait souvent défaut.

Liste des victimes sur : https://www.pressemblem.ch/casualties